Irkoutsk : le sas entre deux mondes

Irkoutsk, c’est un peu notre palier entre deux dimensions : d’un côté, le tumulte ferroviaire du Transsibérien, de l’autre, la parenthèse enchantée du lac Baïkal. C’est là qu’on a soufflé, posé nos gros sacs et pris le temps de comprendre ce qui nous arrivait. C’est aussi la qu’on s’est dit : Ca y est on a plus on moins fait la moitié. Et comme on y est passés deux fois, on a eu droit à deux journées pleines pour l’apprivoiser, cette ville sibérienne aux faux airs de capitale régionale trop calme pour être vraie.

Un peu de contexte géo-historique, parce que c’est pas que du boudin

Située à 66 kilomètres à vol de mouette du lac Baïkal, Irkoutsk est l’une des grandes villes de Sibérie, fondée en 1661 comme poste militaire (parce que la Russie sans forts, c’est comme la vodka sans cornichon : impensable). Traversée par le fleuve Angara, c’est une cité qui a longtemps servi de point d’étape pour les exilés politiques et les marchands. Elle a donc ce petit parfum d’histoire glorieuse et de tristesse gelée.

Aujourd’hui, elle compte environ 600 000 habitants et fait partie des villes russes dites « modernes » (oui, il y a du 4G et du cappuccino mousseux). C’est un carrefour : vers le Baïkal, vers la Mongolie, vers le Pacifique, vers Moscou… un peu comme un hub aéroportuaire, mais sans les retards EasyJet.

Où dormir à Irkoutsk : le choix du pratique

Comme on était dans une logique très logistique (merci le Transsibérien et ses horaires à 3h42 du matin), on a choisi de dormir près de la gare. Littéralement à 3 minutes à pied, histoire de pouvoir courir à notre train sans se prendre les pieds dans le bitume. La gérante ? Glaciale à l’aller, adorable au retour. Une sorte de miracle sibérien. Elle nous a gardé nos sacs pendant notre virée à Olkhon, et nous a même lavé nos fringues à la main avec un sourire timide mais sincère. En Russie, faut pas se fier à la première impression. Faut persister. Elle est pour moi le symbole de ce que sont les Russes, sauvages au premier abord mais quand ils t’apprivoisent, des crèmes. 

Premier contact : Irkoutsk à l’aller

On découvre une ville à taille humaine, vivante, mais sans excès. Le genre d’endroit où tu peux à la fois boire un café hipster dans un bar à filtre et croiser des mamies qui vendent des pizzas moins d’un euro la part sur le trottoir.  C’est plein de contrastes, mais ça fonctionne.

On a surtout beaucoup marché, entre la gare ferroviaire et la gare routière (il faut une heure de marche, autant dire qu’on a le mollet désormais plus musclé qu’un randonneur pyrénéen). Rue après rue, on a découvert des immeubles colorés, des maisons en bois aux fenêtres délicatement sculptées (typique de Sibérie), et une ambiance générale plutôt détendue.

Et surprise : c’est mignon. Il y a des bras du fleuve Angara qui donnent une atmosphère très aérée à la ville. Le pont entre la gare et le centre traverse un joli canal, et quand il fait beau (genre 20°C), c’est même franchement agréable. On pourrait y passer facile 3-4 jours, même une semaine. C’est proche d’Oulan-Oude mais la version bien plus moderne. Des gens commencent à parler anglais. On peu timidement parler avec des gens sans utiliser google traduction? 

Les statues d’Irkoutsk : balade animalière et héros locaux

Irkoutsk a un petit circuit de promenade touristique bien ficelé. Et même sans le suivre officiellement, on a fini par tomber sur plusieurs statues. D’abord celle du castor (ou peut-être un raton laveur très bien nourri ?). Symbole local paraît-il. Ensuite, une imposante statue de Lénine (oui, encore lui) qui regarde droit devant avec le regard de celui qui a vu des choses. Et puis, celle de l’explorateur Alexandre Koltchak, dont la position a été contestée pendant des années. Bref, même sans musée, t’as ton cours d’histoire à ciel ouvert.

Cantines, cafés, pizza et cappuccino mousseux

On a mangé un peu n’importe où, et c’était très bien comme ça. Une pizza achetée à la gare, quelques cantines soviéto-chics où tu choisis tes plats au poids, des cafés où tu bois ton latte sous un mur en briques apparentes… Irkoutsk est un bon mix entre tradition et modernité. Tu sens qu’on est à l’est, mais aussi à un carrefour vers l’Europe. Une petite passerelle culturelle entre Moscou et Oulan-Bator qu’on a pu lire.

Une ville sans programme, mais pleine de charme

Irkoutsk n’est pas une ville où on enchaîne les musées comme un guide Michelin en surchauffe. Non, c’est une ville où on flâne. On l’a fait à l’aller, on l’a refait au retour. On a pris le même chemin plusieurs fois entre la gare et le centre, et au bout de la troisième, c’était comme à la maison.

On a appris à reconnaître les petits kiosques qui vendent des pirojki (chaussons fourrés). C’est ce genre de ville qui devient familière très vite, même sans grand frisson touristique.

Le retour : Irkoutsk round 2, le come-back paisible

Après la parenthèse sauvage d’Olkhon, revenir à Irkoutsk avait un petit goût de confort. On a retrouvé notre chambre, notre gérante (qui était désormais ravie de nous voir, probablement parce qu’on payait deux nuits et qu’on n’avait rien cassé), et on s’est posés pour même pas  24 heures. Pause rapide puisqu’on est arrivés vers 19h et repartis de le lendemain 15h et quelques.

Encore un peu de balade, quelques courses, un café face à la rivière. Rien d’extraordinaire, mais tout fonctionne.

Irkoutsk, une bonne étape sur la route du bout du monde

Irkoutsk, c’est pas le choc esthétique du siècle, mais c’est une bonne surprise. Une ville qu’on n’avait pas cochée comme « immanquable » et qui nous a quand même marqués. Par son calme, sa douceur, ses contrastes, et ce petit je-ne-sais-quoi de fin de monde tranquille.

Et puis surtout, Irkoutsk, c’est ce genre de ville qui prend tout son sens quand on fait le Transsibérien. Parce qu’en réalité, aucune ville n’est un feu d’artifice en soi, mais c’est l’ensemble qui fait le voyage : la manière dont chaque étape t’éloigne de la précédente, dont chaque gare t’ouvre une porte différente. Irkoutsk, c’est le palier entre deux aventures. Le sas entre deux Russies. Et franchement, on est contents d’y être passés deux fois.

Le soir on prend le train vers Krasnoyark qu’on a aussi choisi un peu au hasard, on va dormir dans deux couchettes du haut, j’appréhende un peu le fait de ne pas avoir d’espaces à nous hors pour dormir mais on verra bien. La haute saison qu’on nous a dit ou qu’on a essayer de nous faire comprendre par un hausement d’épaules quand on s’inquiète des prix et des places restantes